Kate Moss
En exclusivité pour Lui, le mannequin Kate Moss a reçu Terry Richardson dans sa maison londonienne. Au lendemain de son quarantième anniversaire, c’est elle qui nous offre le plus joli des cadeaux.
Katherine Ann Moss voit le jour le 16 janvier 1974. Appelons-la Kate Moss, directement.
A la naissance de Kate, l’AS Saint-Étienne cartonne en championnat de France, Jimmy Connors remporte Wimbledon, les Ramones donnent leur premier concert et, avec «I Shot the Sheriff», Eric Clapton balance un tube qui va rester dans les mémoires.
Pour l'instant, Kate Moss ne se doute de rien. Elle grandit tranquillement à Croydon dans la banlieue sud de Londres. La jeune fille va vivre ses tendres années dans la maison familiale sur Church Way L’enfant fréquente l’école primaire et le collège sans s’imaginer quelle fera plus tard la une du magazine Lui, en 2014. Très éloignée de la vie qui sera la sienne une fois sa carrière débutée, la petite cité est banale et sans effervescence. Kate Moss est une môme britannique typique. Cette particularité va contribuer à son aura. Bientôt, la môme typique va devenir la fille des rues la plus transgressive du Système solaire. Tout se prépare pour que la bombe explose. Il y a l'ennui, les bières que l’on s’enfile dans le square d’à côté, la ville de Londres qui se refuse à vous et David Bowie que l’on écoute dans sa chambre en permanence avec la lumière éteinte.
Il faut secouer le tout en mettant 1,67 m d’insouciance pour obtenir la mythique future fée de toutes nos nuits. Place à l’acte fondateur. Fin des années 80. Aéroport JFK. Kate Moss a 14 ans. Elle est découverte par hasard par l’agent de mannequins Sarah Doukas. Adieu les Claudia Schiffer et autres top models aux formes arrondies. Place à la poitrine la plus menue et sexy de la terre entière. Place à tous les superlatifs. Place à tous les excès. Le visage pâle et imparfait de Kate Moss symbolise la nouvelle vague de la mode et du look. John Galliano est l’un des premiers à lui faire confiance et à
la faire défiler: « Elle avait 14 ans, un côté sauvage, un corps incroyable et déjà un grand sens du style et des mélanges. » Kate est une révélation. A la fois romantique, rude et rayonnante. Cest l’ovni des shootings. Avec son mètre soixante-sept, cette fille inclassable jure dans le tableau des défilés. Elle ressemble à cette phrase de Dostoïevski: «Je m’aperçus queje ne ressemblais à personne et que personne m me ressemblait. Je suis seul tandis qu’eux ils sont tous, me disais-je. »
Je vous épargne l’épisode de la suite d’hôtel dévastée par Kate et Johnny Depp. Il y a plus intéressant.
Kate Moss et son image ainsi que la différence entre la personne et son personnage.
Kate est une femme mystère : de celle qu’on voit partout mais dont on ne sait rien, ou presque. Cest un brouillard médiatique quelle entretient avec une réelle volonté d’indépendance: devenir invisible au fur et à mesure qu’on la rend visible, et entretenir le secret. Les adeptes du pragmatisme, du mérite et de la transparence partent en guerre contre le top model. Normal. Kate Moss, avec son côté « dandy lolita», incarne une forme supérieure de perversité honnie par les intellectuels de classes moyennes. La réponse à ce ressentiment tient en une phrase d’Oscar Wilde: «La perversité est un mythe inventé par les bonnes gens pour expliquer l’étrange attrait de certains autres. »
Au cœur de Londres, quartier Saint James, chez Christie’s, s’est déroulée la première mondiale d’une vente aux enchères dédiée entièrement à Kate Moss.
Le personnage et la personne vont se retrouver en une seule et même journée. Jamais un tel événement ne s’était produit pour un être humain.
À savoir une allumette géniale, une rock star, un feu de paille qui dure.